mercredi, août 30, 2006

L'avenir improbable de l'industrie européenne. (5.10.2005)

Houspillée par le "microcosme" français, Jacques Chirac le dernier en date reprochant hier à Bruxelles, à mots à peine couverts, de "se désinteresser" de dossiers comme celui, douloureux, de Hewlett Packard, la Commission européenne vient d'annoncer les axes de la politique industrielle qu'elle souhaite renforcer. Rappelons qu'à l'occasion d'un fameux sommet européen tenu à Lisbonne en 2000 - au plus fort de l'emballement spéculatif des marchés et de la montée en puissance du discours de la mondialisation - il avait été fixé un agenda ambitieux visant à faire de l'Union européenne la zone économique la plus compétitive du monde. Intentions parfaitement louables... suivies des effets que l'on sait !


Le détail des sept initiatives que présente M. Verheugen, le commissaire européen à l'Industrie, sont intéressantes à plus d'un titre :


1. Simplification de la législation européenne
2. Aider les entreprises à affronter les changements structurels imposés par la mondialisation
3. Favoriser le rapprochement industrie-recherche
4. Créer un groupe sur les liens entre comptétitivité, énergie et environnement
5. Traiter la question de l'accès aux marchés extérieurs
6. Renforcer les droits de protection de la propriété intellectuelle, et la lutte contre la contrefaçon ; accentuer les efforts de formation sur ces points
7. Protéger, ou tout au moins suivre de plus près, certains secteurs industriels critiques : pharmacie, chimie et biotechnologies, le secteur industriel lié à la défense et à l'espace, les technologies de l'information et des télécommunications, l'industrie mécanique.


Voilà un panaché d'actions assez variées, visant à couvrir un très large pan de l'industrie européenne ou de ce qu'il en reste. Car ce plan est annoncé dans un contexte caractérisé par deux constats de fonds : d'une part l'articulation entre les initiatives européennes et les programmes nationaux - qui parfois les redoublent, parfois les contredisent - ne marche pas ; d'autre part, le "positionnement" industriel de l'Europe est particulièrement fragile, exclusivement situé qu'il est dans des industries à contenu technologique usuellement qualifié de "moyen à fort", terrain où il est exposé de plein fouet à la concurrence de pays "low-cost" comme l'Inde ou la Chine. Une délocalisation des centres de recherche et de développement pourrait annoncer un évanouissement beaucoup plus rapide de l'industrie européenne que celui qu'elle subit aujourd'hui avec les délocalisations des centres de production.


Au plan du dogme, il est frappant de lire dans l'inventaire des mesures, en dehors de l'inusable convocation du rapprochement industrie-recherche et de la promesse de simplification, éternellement ressassées dans ce genre d'exercice, le credo d'un impact inévitablement destructeur de la mondialisation, tant local (industrie en Europe) que global (énergie, environnement), contre lequel une "forteresse" doit être élevée (renforcement des droits d'IP, menaces de luttes et de sanctions, secteurs critiques) par un interventionnisme industriel qui hésite de moins en moins à dire son nom.


Pas facile pour l'entrepreneur high-tech en Europe d'imaginer son scénario de développement dans ce tableau plutôt défensif, entre marchés atones et "sorties" à l'étranger tantôt bénies tantôt honnies !

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