dimanche, mars 18, 2007

Les géants de l'industrie informatique se disputent la téléphonie

Comme si le front Google ne suffisait pas à Microsoft, voilà que s'ouvre un nouveau champ de bataille entre géants de l'industrie. L'actualité récente laisse en effet à penser que Microsoft et Cisco se mettent en ordre de bataille pour une confrontation sur le terrain des télécommunications.

La rumeur avait circulé fin janvier, puis a trouvé une nouvelle ampleur cette semaine, selon laquelle Microsoft rachèterait la startup Tellme Networks (320 personnes et plus de $235m de capital risque levés quand même !), à une valorisation dépassant $800m. Tellme développe des interfaces de commande vocale et des serveurs d'applications « audiotel » ; c'est un spécialiste de VoiceXML, le langage dérivé de XML pour décrire les applications vocales. Pourquoi un tel prix, qui en ferait l'une des plus chères des acquisitions de Microsoft après Navision en 2002, Great Plains Software en 2001 et Visio en 1999 ? Certes les applications vocales de Tellme Networks trouveraient certainement une place dans la suite d'applications d'entreprise de Microsoft, mais est-ce tout ?

L'observateur de l'industrie informatique Om Malik est allé pêcher dans une interview de Steve Ballmer au Wall Street Journal en mai 2006 une remarque, passée à l'époque inaperçue, mais qui pourrait jeter une lumière différente sur cette acquisition. « La ligne de crête du champ de la bataille qui nous oppose à Google dans la recherche de proximité [c'est-à-dire, information locale, petites annonces, etc.] passe par la téléphonie mobile » avait déclaré le CEO du géant de Redmond. Si l'emprise de Google sur la recherche sur le Web est en effet assez incontestable, la recherche sur le mobile est encore un terrain à conquérir. D'ailleurs, sur ce sujet, Microsoft était venu jusqu'à Paris en février 2006 acquérir la startup MotionBridge et son moteur de recherche pour les services mobiles. L'acquisition de Tellme Networks permettrait à Microsoft de se renforcer singulièrement dans ce secteur et de rendre Windows Mobile à la fois bien plus « user-friendly » et conforme aux architectures déjà en place des opérateurs mobiles.

Chez Google, après la messagerie instantanée, on fait toujours état de plans pour la téléphonie IP qui iraient sur ces mêmes brisées. Google Talk offre aujourd'hui quelques possibilités VoIP, mais pas au standard SIP employé par la grande majorité des acteurs de la téléphonie Internet - à l'exception fameuse de Skype. Dave Girouard, patron de la division entreprise de Google, a déclaré en décembre dernier que la VoIP de Google se déploierait sur la base et en fonction du succès des Google Apps, ces applications de bureautique hébergées par le moteur de recherches. Les esprits fertiles pourront rapprocher ces déclarations, de celles plus techniques sur l'évolution de Google Talk vers le standard SIP, plus répandu, et des fameux datacenters aux débits d'accès faramineux dont Google multiplie depuis un an les constructions sur tout le territoire américain. Il faudrait assez peu, à ce stade, pour que Google ne commence à offrir des services d'opérateur téléphonique VoIP. Puis, sans effort indu d'imagination, des services de téléphonie IP aux mobiles.

Mais, cette semaine, ce n'est pas de Google qu'est venue la réplique aux mouvements de Microsoft dans l'arène des télécommunications. C'est Cisco qui défraye la chronique en annonçant l'acquisition de WebEx, le fournisseur d'outils et de services de téléconférence sur le Web (3,2 milliards de dollars si la transaction est conclue). WebEx, célèbre pour ces outils de vidéo et d'audio-conférence sur le Web, possède également, depuis son acquisition d'Intranets.com, des outils de partage de documents et de collaboration qui permettront à Cisco d'héberger des services comparables à ceux de LiveMeeting de Microsoft - qui les avait lui-même acquis dans l'achat de PlaceWare en 2003 (pour $200m).

Notons que dans les deux cas le prix d'acquisition payé par les deux géants est très élevé, même si WebEx affichait déjà $380m de revenus l'année dernière. Mais l'enjeu d'une position prépondérante sur le marché de la « convergence » des services de voix et de données aux PC et aux mobiles vaut assurément ces investissements majeurs.

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